Le suivi en Seine-Saint-Denis et en Île-de-France

En 2006, une campagne d’information en direction des bénéficiaires de l’Acaata menée dans le cadre du partenariat entre la CPAM 93 et l’Addeva 93 avait permis de multiplier par cinq le nombre de demandes. Mais, dans les années qui ont suivi, ce nombre est passé de 217 en 2007 à… 23 en 2014. Un chiffre anormalement bas pour un département où vivent un million et demi d’habitants à forte proportion ouvrière.

Entre 2014 et 2016 une action nationale a été lancée par la Caisse nationale d’assurance maladie dans toutes les régions avec l’envoi d’une lettre et d’un questionnaire d’exposition à tous les allocataires présents et passés. Le questionnaire a suscité des méfiances parmi les destinataires, certains craignant de perdre leurs droits. En Ile-de-France, il y a eu 3291 envois. Le taux de réponses (environ 20%) est décevant. L’expérience montre que le taux d’examens effectivement passés peut être sensiblement inférieur aux demandes.

L’exemple de l’Alstom Saint-Ouen

Pour combler le manque d’information, l’Association des anciens salariés Alstom/Areva Transformateurs de Saint-Ouen, l’Addeva 93 et la CPAM 93 ont organisé une réunion d’information le 17 février 2016 à la Bourse du travail de Saint-Ouen, établissement inscrit sur la liste ouvrant droit à la « pré-retraite amiante ». Plusieurs milliers de salarié(e)s y ont été exposés. A ce jour, une vingtaine de maladies professionnelles liées à l’amiante y ont été reconnues, dont 6 décès par cancer. Trois autres décès par cancer sont en attente de reconnaissance. .

La CPAM 93 s’est chargée d’envoyer aux 160 assurés concernés l’invitation à cette 1ère réunion ainsi qu’un questionnaire élaboré par les deux associations, détaillant tous les métiers, les secteurs et les activités de cette usine.

Cette réunion a réuni une soixantaine de personnes. Elle avait pour but de répondre à toutes les questions des personnes qui ont été exposées : Quelles maladies ? Pourquoi un suivi médical ? Que peut-il apporter ? Comment en bénéficier ? Elle a surtout été centrée sur l’amiante, même si d’autres cancérogènes ont été évoqués.

Deux responsables de l’Association des anciens d’Alstom TSO, un ancien médecin du travail de l’usine, le président de l’Addeva 93 et trois responsables de la CPAM 93 ont expliqué tour à tour les maladies de l’amiante, l’intérêt et les modalités du suivi médical post-professionnel, ainsi que du suivi post-consolidation pour les anciens atteints d’une pathologie professionnelle (une douzaine de plaques pleurales ont déjà été reconnues).

Dans la salle 22 personnes (une sur trois environ) avaient déjà passé au moins un scanner pulmonaire depuis leur départ en (pré)retraite (ou leur entrée au chômage). Les autres n’en avaient jamais passé. Beaucoup d’entre eux ne connaissaient pas ce droit.

Ceux qui avaient demandé un suivi évoquèrent les difficultés rencontrées: le délai d’instruction des demandes est souvent trop long ; certains radiologues exigent la carte vitale, alors que ces examens sont pris en charge par la branche AT-MP de la Sécurité sociale (financées par les employeurs). D’autres ne respectent pas le protocole (ces examens doivent se dérouler sans injection de produit de contraste).

En fin de réunion, 36 questionnaires ont été remplis et remis aux organisateurs. Les demandes de suivi médical ont été traitées très rapidement par la caisse primaire.

L’Addeva 93 a proposé d’étendre cette démarche à d’autres établissements d’Ile-de-France.

Un suivi médical post-exposition à Aulnay

Sous la pression des associations (Collectif des riverains, Ban Asbestos, Addeva 93, Aulnay autrement), l’Agence régionale de la Santé en Ile-de-France (ARS) et la ministre de la Santé ont accepté d’engager une recherche des écoliers scolarisés dans la période 1938-1975 dans une des trois écoles du Bourg 1, du Bourg 2 et de l’Ormeteau (maternelle et primaire), proches de l’usine d’amiante CMMP d’Aulnay-sous-Bois. Une étude du GISCOP (groupement d’intérêt scientifique pour surveiller les cancers d’origine professionnelle) a montré la faisabilité de cette action et en a détaillé les modalités.

L’ARS a envoyé aux anciens écoliers une lettre les informant qu’ils ont été exposés aux poussières d’amiante du CMMP et les invitant à se faire prescrire un scanner par leur médecin traitant auquel serait envoyées une lettre et une note d’information. 7000 envois ont eu lieu.

Les associations ont soutenu la démarche du suivi médical post-exposition, mais elles ont soulevé plusieurs problèmes sur la méthode utilisée par l’ARS :

– Elles se sont opposées à la destruction des fichiers annoncée par un arrêté de mai 2014. Elles ont obtenu que cette destruction soit ajournée dans l’immédiat, mais sans engagement sur le long terme.

– Elles ont souhaité que l’accueil téléphonique, confié à une jeune société sans expérience soit amélioré.

– Elles ont considéré qu’une évaluation du dispositif ne pouvait se borner à un recensement du nombre, de l’objet et de la durée des appels, en regrettant que l’ARS ne se soit pas donné les moyens de faire remonter les informations sur les pathologies repérées ni sur leur indemnisation.

– Les associations et la mairie ont demandé que la recherche de personnes exposées et de victimes soit étendue aux anciens salariés du CMMP, à d’autres établissements proches de l’usine et au personnel des écoles (enseignements, agents de service). Sans résultat.

Un collectif d’information et d’accompagnement des personnes exposées à Aulnay-sous-Bois (Ci3a) s’est mis en place avec le soutien de la mairie d’Aulnay-sous-Bois, qui a mis à disposition des locaux dans le Centre d’examens de Santé (CMES) avec l’appui du service de santé et d’hygiène municipal.

Les services de pneumologie et de radiologie de l’hôpital Robert Ballanger ont mis en place un dispositif particulier pour assurer ce suivi.